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génétique

  • Evolution

    Dans la lumière et les ombres

    Jean-Claude Ameisen

    Darwin et les bouleversements du monde

    L’aube

    DSC_0587_web.jpg  Darwin, jeune naturaliste, est désireux de faire un voyage autour du monde. Il commence par un stage chez son oncle et futur beau-père. Celui-ci est féru de géologie et s’intéresse à la couche supérieure des sols : l’humus. Par lui, Darwin trouve l’occasion de faire un voyage de cinq ans comme naturaliste sur un bateau, le Beagle, qui fait le tour de monde. Au retour, il s’adonne pour son oncle, à  l’étude des vers qui remuent la terre. Il apprend à cette occasion la précision nécessaire à l’observation et le souci des détails. Il prend conscience que les changements dans la nature font suite à une accumulation, sur des grandes périodes de temps, de conséquences anodines. Il a aussi l’occasion de lire les « Principes » de Lyell, géologue qui s’attache à « expliquer les changements anciens en référence à des causes  actuellement en train d’opérer. » Il constate aussi que le vers : « … n’a pour intention que son propre gain ; et il est …  mené par une main invisible à promouvoir une fin qui ne faisait pas partie de ses intentions ! »

    C’est au départ de ces intuitions et de ses nombreuses observations qu’il va petit à petit arriver à exprimer le  “Mystère des Mystères” dans son livre intitulé “L’origine des espèces par la sélection naturelle”. Il est convaincu de la transmutation des espèces. Les espèces ne sont pas stables mais évoluent lentement, selon l’expression  « transmission avec modification ». Ces modifications se font sans but précis, et c’est alors la sélection naturelle qui garde les espèces les plus appropriées à l’environnement du moment. C’est avec quelques contemporains Wallace, de Lamark,  qu’il arrivera  faire valoir ses idées. Il s’opposera à de nombreux naturalistes qui circulent dans le monde entier pour faire l’inventaire et le classement des espèces vivantes, Cuvier, comte de Buffon, Carl von Linné, Saint-Hilaire. Mais ceux-ci n’ont pas besoin de l’évolution,  le fixisme leur suffit.

    La nuit

    L’auteur marque un intermède dans les résultats de la recherche scientifique pour décrire tous les débats et remous qui ont suivi la diffusion de la théorie de “l’Origine des espèces”. C’est l’époque où Malthus fait un essai sur le principe de population qui véhiculait des idées très pessimistes. Parmi toutes les découvertes ramenées de l’exploration du monde, on découvre aussi avec stupeur des tribus qui n’ont pas encore été atteintes par la civilisation. Or normalement l’évolution  entraîne l’élimination du plus faible ! Principe insoutenable pour des êtres humains. Pourtant le monde fera des théories sur les races, sur l’eugénisme, l’euthanasie ... Cela finira par cet épisode sinistre de l’amélioration de la race aryenne et du nazisme d’Hitler. L’auteur se sent impliqué personnellement dans ces remous. Ce deuxième passage se termine par un voyage de l’auteur à Auschwitz, où il a perdu des membres de sa famille.

    Dans le futur distant

    Un troisième épisode du livre s’attache à la découverte des mécanismes qui réalisent les « petits changements » de l’évolution. Il s’agit de l’ADN qui forme les gènes. L’ADN était apparu discrètement en 1869. Il était connu comme un composant du noyau de la cellule. Mais ce n’est qu’en 1953, à la faveur de recherche sur les bactéries qu’a été mis au jour son rôle dans la transmission des caractères héréditaires. Son comportement est extrêmement subtil. Construction de l’embryon, stabilité de l’espèce, différentiation des organes et des tissus, lutte contre les agressions … Aujourd'hui encore, on traque les mutations des bactéries afin de composer les vaccins pour protéger les membres les plus âgés de la population. Ceci n’étant qu’un exemple de la complexité des situations  où la génétique est présente avec ses victoires et ses dérives. Ainsi on voit que les forces qui ont opéré l’évolution des espèces sont toujours actives dans nos vies. Cela nous rappelle le projet du géologue Lyell, le contemporain de Darwin, qui voulait : « Expliquer les changements anciens en référence à des causes actuellement en train d’opérer. »

    Cette immense fresque est traversée du début à la fin par la confrontation entre deux conceptions antagonistes du monde. Cela commence par la vision de la Bible qui laisse penser que les espèces ont été crées directement par Dieu, cela continue par la réflexion des grecs « Tout coule » et «  Rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme ». Cet antagonisme traverse les âges jusqu’à l’époque actuelle où la confrontation entre le fixisme des espèces et l’évolution est toujours présente.

    Avis du bloggeur

    Prenez le temps de lire ce livre. On y découvre non seulement une des clés de la connaissance sur l’hérédité, mais aussi tout ce que cette recherche entraîne comme espoirs ou troubles dans l’histoire des hommes.

  • Albert Jacquard

    Albert Jacquard

    Est décédé le 11 septembre 2013.

    A l’occasion de sa disparition, nous avons pu écouter l’émission « Noms de dieux » enregistrée en 1994. En voici quelques idées fortes. Il y montre sa vision de l’univers, ses appréhensions sur les manipulations génétiques et l’accroissement de la population ainsi que la responsabilité de l’homme devant son avenir.

    Albert Jacquard, ADN, génétique, éthique

    Noms de Dieux

    Chez Albert Jacquard, la science a eu raison de la foi. Il a la religion de l’humanitude.
    Humaniste et biologiste il a écrit de nombreux livres de vulgarisation, un des plus connu étant : “La légende de la vie”.

    I Le nom

    « Noms de ceux dont les liens sont Dieu ! » Voilà une expression curieuse. Elle manifeste que  Les hommes en s’assemblant, font plus qu’eux-mêmes et cela constitue la réalité suprême.

    En tant que scientifique, il ne croit à rien. Il n’y a pas de Dieu puissant, de Dieu créateur. Albert Jacquard veut construire le monde pour le milliard d’hommes qui  vient. Il faut rechercher la dignité de tous les hommes. De ce point de vue, l’évangile et le manifeste de Karl Marx sont des livres compatibles.  Il a une prédilection pour saint François d’Assise, pour son amour de la nature qui l’émeut lui le scientifique. Car la réalité principale c’est l’univers dans lequel nous grandissons.

    On oppose parfois deux termes :  “religere” ou  “relegare” : relier ou relire ? Il préfère le deuxième terme. Il ne faut pas se relier à quelque chose. Nous sommes dans le monde et il ne faut pas chercher autre chose.  Il faut relire le monde pour discerner l’important. Parmi les événements importants il y a notre prochain avenir. D’ici quelques années nous serons 11 milliards sur la terre.

    II L’image

    L’image choisie est une spirale d’ADN. Pour Albert Jacquard, c’est une molécule simple et banale qui n’est vraiment pas séparée de la matière. La cellule vivante est simplement hypercomplexe. Mais elle a découvert et mis en œuvre l’accumulation d’informations. L’ajustement extraordinaire des constantes de l’univers qui permet la vie ne le désarçonne pas. Il ne croit pas à un Dieu créateur, il adhère à la notion des multivers, notion défendue entre autres par Stephen Hawking. Cette notion indique que de nombreux univers sont nés spontanément avec diverses compositions de ces constantes de base. Il se fait que nous sommes par hasard dans l’univers où l’assemblage des constantes permet la vie.

    Pourtant, nous sommes plus que des objets par la conscience que nous prenons de ce que nous sommes.   « Maintenant que j’ai découvert l’ADN, j’ai découvert le secret de ce qui m’a fait. Je suis responsable le de ce que j’en fais ». Avec la connaissance de l’ADN qui est la nôtre au XXème siècle, nous sommes devenus quasi créateurs.

    Nous sommes plus que des objets principalement par tous les contacts que nous avons eus.  « Je suis le résultat de ceux qui m’ont regardé et entouré. Je suis les liens que je tisse. Il faut organiser le monde pour que chacun puisse devenir une personne. Or nous en sommes loin ! »

    III La phrase

    « Il y a des choses qu’il vaudrait mieux ne pas faire » Albert Einstein.

    Cette phrase a été prononcée peu après l’explosion d’Hiroshima. Les physiciens ont constaté alors qu’une science dont on est fier, peut provoquer des désastres invraisemblables. Mais après la bombe atomique et ses destructions, il y a les dangers des biologistes et des manipulations génétiques. L’aventure humaine a consisté depuis le début à se donner de plus en plus de pouvoir. Avec la découverte du code génétique, nous sommes arrivés à un tournant. De nombreuses situations nouvelles peuvent réduire l’homme a à un objet.

    Par exemple, si on peut connaître et divulguer l’avenir génétique des personnes que vont  dire l’employeur lors de l‘embauche, l’assureur…  Qui va décider ? Il faut aussi stopper le commerce des organes où les plus pauvres vendent des parties de leur corps au plus riches !  Le diagnostic préimplantatoire, par exemple, permet d’écarter les embryons ayant la maladie de Tay-Sachs. Mais qu’en sera-t-il si ce diagnostic annonce un enfant qui aura la maladie d’Alzheimer à 60 ans ? Faudra-t-il éliminer ces enfants ? Puisque nous auront le choix, faut-il arrêter de soigner les retraités parce que cela n’est plus rentable ? Il faut retirer tous les problèmes de santé de la logique économique. Nous semblons nous diriger vers un avenir monstrueux.

    Pour éviter les dangers, il faut, après avoir introduit une démocratie de gestion, instaurer une démocratie de l’éthique. Il faut en effet savoir dire non quand on côtoie des choses inacceptables et décider ensemble de notre avenir.

    IV Le symbole

    Une pierre qui contient l’empreinte d’une fougère.

    Il aurait pu prendre la main de Pech Merle. Elle indique la possibilité de se survivre. Le monde se souvient de tous les événements qui ont lieu dans son histoire.

    Pourquoi une pierre lui fait-elle penser à la vie humaine : parce qu’il n’y a pas de frontières entre l’inanimé et le vivant. Mais il a beaucoup de différences quant aux performances dont nous sommes capables.

    En découvrant l’amour, nous tissons des liens et nous construisons notre interdépendance, nous sommes responsables  de Dieu ! Il n’y a pas besoin de Dieu. D’ailleurs le Dieu jaloux, tout puissant et vengeur est mort avec Jésus-Christ comme l’a dit le dominicain Carbonel. (« Dieu est mort en Jésus-Christ »)

    V Le pari

    Demain dépend de nous.

    Nous sommes responsables de ce qui va arriver. Or nous courons dans la pire des directions. Nous poussons la compétition, la destruction des uns par les autres. Si je suis en compétition avec l’autre, je ne tisse plus de lien, par conséquent je suis en train de ma suicider. Il faut extirper la notion de compétition de toute la société.  « Il faut dire : tu vas te construire avec l’aide des autres, et pas tu vas être meilleur que les autres. »

    Autre défi : l’augmentation de la population. Son souci est toujours ce nombre de 11 milliards que nous allons atteindre. Pour s’y apprêter, nous devons consommer moins pour qu’il y ait de la place pour les futures générations. Il faut être égaux dans le partage des richesses de la terre. Pour aider à affronter la surpopulation, il faut absolument favoriser l’éducation des filles.

    L’avenir est donc une question de partage. Et Dieu dans tout cela ? « Si l’homme construit l’amour, il construit Dieu. Il n’y a pas besoin de chercher plus loin ».

     

    Peut-être ces quelques idées vous donneront-elles l’envie de
    revoir cette émission.

  • Trois visions

    Fleur_a.gifTrois lectures, trois visions du monde

    Les trois dernières lectures que j’ai eu l’occasion de faire nous ont promenés aux antipodes de l’intelligence actuelle du monde. Il y a d’abord « L’histoire des religions » qui parie sur la seule intelligence, puis « La crise écologique » qui souhaite une nouvelle « spiritualité » et enfin « La génétique au risque de l’eugénisme. » qui se noie dans la science.

    Le premier livre s’attache à l’histoire des religions. Il pense découvrir une ligne dans leurs modifications progressives. Les religions évolueraient au fur et à mesure que l’homme se rendait maître de la nature. Il propose, comme fil conducteur de l’évolution du sentiment religieux, l’arrachement progressif de l’homme à l’ordre naturel. Le moment ultime de cet arrachement est le passage à la modernité qui conduit l’homme moderne devant une nature désenchantée. Ainsi le destin de l’homme est d’organiser la cité humaine par la seule raison. Cela me suggère comme avenir un échafaudage de pays laïques culminant démocratiquement dans l’ONU et dominant ainsi les derniers particularismes des nations.

     La deuxième lecture concernant la crise écologique me fait faire un retour en arrière quasi de 180 degré ! L’homme ne maîtrise pas l’environnement, il s’est cru trop fort et trop maître de la nature et il l‘a saccagée ! Il faut maintenant dominer le désordre dans l’environnement. Il est temps que l’homme se change, qu’il redevienne plus proche de la nature. La direction est bien opposée à la précédente qui se trouve dans l’histoire des religions ! C’est quasi à une nouvelle spiritualité des temps modernes que  l’ensemble des intellectuels préoccupés de l’écologie nous appelle. Il s’agit d’une religion universelle qui renoue avec les débuts de l’humanité, à l’époque où elle se sentait plus faible que la nature et devait, par l’intermédiaire des chamans lui offrir des sacrifices. Il y a ainsi des gestes à poser pour s’amadouer la nature, des sacrifices en somme !

    Sacrifices me direz-vous, mais où et quand ? Par exemple dans les associations qui maintiennent artificiellement en vie des espèces qui n’ont plus la place pour se reproduire naturellement. Le maintien du guépard en est une illustration manifeste. Il faudrait citer aussi le sauvetage des tigres de Malaisie, etc.

    Ainsi, la prise de conscience de la crise écologique actuelle conduit à penser que la raison et la politique qui en découle ne suffisent pas pour maîtriser l’environnement. Il faut en revenir à une religion de proximité de la nature, une nouvelle spiritualité !

     La troisième lecture sur la génétique nous enfonce dans le monde ésotérique du génome humain. La solution des naissances difficiles fait de plus en plus appel à la science et sa technique. Elle permet ou permettra d’éviter toutes les anomalies congénitales. Même des théologiens de l’Académie Pontificale des sciences s’appliquent à connaître le génome humain de manière tout à fait pointue pour être présents dans ce salut héréditaire. Il y a bien quelques précautions pour éviter les dérapages. Mais les cris de victoire de la thérapie génique sont constants. Ce matin encore, j’écoutais, dans un communiqué fait à la radio, la satisfaction de médecins ayant corrigé l’aptitude à la vue d’un nouveau-né. La bonne santé prochaine de l’humanité est dans la maîtrise de plus en plus grande de la nature, de la science que l’on peut en avoir. La foi, bien que nous soyons dans une Académie Pontificale n’apparaît que par un ou deux termes. Ainsi le mot personne. Mais celui-ci a déjà tellement perdu de sa force qu’il faut l’appuyer par « la dignité » pour le faire entendre !! La prise de conscience suscitée par cette assemblée est donc de poursuivre dans les recherches scientifiques. La vision chrétienne de jadis ne donne que peu d’éclairage sur ces problèmes.

     Voilà trois points de vue, trois directions différentes et divergentes. Existe-t-il quelque part un sage ou une sagesse qui voit l’articulation de ces trois objectifs ? Après tout, nous sommes dans un seul monde et il nous faut vivre avec des philosophes et politiciens, des scientifiques et techniciens, des révélations et des gourous. Il doit exister une triple vision au lieu de trois visions ? Voilà en tous cas un beau sujet de réflexion !