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Science

  • Albert Jacquard

    Albert Jacquard

    Est décédé le 11 septembre 2013.

    A l’occasion de sa disparition, nous avons pu écouter l’émission « Noms de dieux » enregistrée en 1994. En voici quelques idées fortes. Il y montre sa vision de l’univers, ses appréhensions sur les manipulations génétiques et l’accroissement de la population ainsi que la responsabilité de l’homme devant son avenir.

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    Noms de Dieux

    Chez Albert Jacquard, la science a eu raison de la foi. Il a la religion de l’humanitude.
    Humaniste et biologiste il a écrit de nombreux livres de vulgarisation, un des plus connu étant : “La légende de la vie”.

    I Le nom

    « Noms de ceux dont les liens sont Dieu ! » Voilà une expression curieuse. Elle manifeste que  Les hommes en s’assemblant, font plus qu’eux-mêmes et cela constitue la réalité suprême.

    En tant que scientifique, il ne croit à rien. Il n’y a pas de Dieu puissant, de Dieu créateur. Albert Jacquard veut construire le monde pour le milliard d’hommes qui  vient. Il faut rechercher la dignité de tous les hommes. De ce point de vue, l’évangile et le manifeste de Karl Marx sont des livres compatibles.  Il a une prédilection pour saint François d’Assise, pour son amour de la nature qui l’émeut lui le scientifique. Car la réalité principale c’est l’univers dans lequel nous grandissons.

    On oppose parfois deux termes :  “religere” ou  “relegare” : relier ou relire ? Il préfère le deuxième terme. Il ne faut pas se relier à quelque chose. Nous sommes dans le monde et il ne faut pas chercher autre chose.  Il faut relire le monde pour discerner l’important. Parmi les événements importants il y a notre prochain avenir. D’ici quelques années nous serons 11 milliards sur la terre.

    II L’image

    L’image choisie est une spirale d’ADN. Pour Albert Jacquard, c’est une molécule simple et banale qui n’est vraiment pas séparée de la matière. La cellule vivante est simplement hypercomplexe. Mais elle a découvert et mis en œuvre l’accumulation d’informations. L’ajustement extraordinaire des constantes de l’univers qui permet la vie ne le désarçonne pas. Il ne croit pas à un Dieu créateur, il adhère à la notion des multivers, notion défendue entre autres par Stephen Hawking. Cette notion indique que de nombreux univers sont nés spontanément avec diverses compositions de ces constantes de base. Il se fait que nous sommes par hasard dans l’univers où l’assemblage des constantes permet la vie.

    Pourtant, nous sommes plus que des objets par la conscience que nous prenons de ce que nous sommes.   « Maintenant que j’ai découvert l’ADN, j’ai découvert le secret de ce qui m’a fait. Je suis responsable le de ce que j’en fais ». Avec la connaissance de l’ADN qui est la nôtre au XXème siècle, nous sommes devenus quasi créateurs.

    Nous sommes plus que des objets principalement par tous les contacts que nous avons eus.  « Je suis le résultat de ceux qui m’ont regardé et entouré. Je suis les liens que je tisse. Il faut organiser le monde pour que chacun puisse devenir une personne. Or nous en sommes loin ! »

    III La phrase

    « Il y a des choses qu’il vaudrait mieux ne pas faire » Albert Einstein.

    Cette phrase a été prononcée peu après l’explosion d’Hiroshima. Les physiciens ont constaté alors qu’une science dont on est fier, peut provoquer des désastres invraisemblables. Mais après la bombe atomique et ses destructions, il y a les dangers des biologistes et des manipulations génétiques. L’aventure humaine a consisté depuis le début à se donner de plus en plus de pouvoir. Avec la découverte du code génétique, nous sommes arrivés à un tournant. De nombreuses situations nouvelles peuvent réduire l’homme a à un objet.

    Par exemple, si on peut connaître et divulguer l’avenir génétique des personnes que vont  dire l’employeur lors de l‘embauche, l’assureur…  Qui va décider ? Il faut aussi stopper le commerce des organes où les plus pauvres vendent des parties de leur corps au plus riches !  Le diagnostic préimplantatoire, par exemple, permet d’écarter les embryons ayant la maladie de Tay-Sachs. Mais qu’en sera-t-il si ce diagnostic annonce un enfant qui aura la maladie d’Alzheimer à 60 ans ? Faudra-t-il éliminer ces enfants ? Puisque nous auront le choix, faut-il arrêter de soigner les retraités parce que cela n’est plus rentable ? Il faut retirer tous les problèmes de santé de la logique économique. Nous semblons nous diriger vers un avenir monstrueux.

    Pour éviter les dangers, il faut, après avoir introduit une démocratie de gestion, instaurer une démocratie de l’éthique. Il faut en effet savoir dire non quand on côtoie des choses inacceptables et décider ensemble de notre avenir.

    IV Le symbole

    Une pierre qui contient l’empreinte d’une fougère.

    Il aurait pu prendre la main de Pech Merle. Elle indique la possibilité de se survivre. Le monde se souvient de tous les événements qui ont lieu dans son histoire.

    Pourquoi une pierre lui fait-elle penser à la vie humaine : parce qu’il n’y a pas de frontières entre l’inanimé et le vivant. Mais il a beaucoup de différences quant aux performances dont nous sommes capables.

    En découvrant l’amour, nous tissons des liens et nous construisons notre interdépendance, nous sommes responsables  de Dieu ! Il n’y a pas besoin de Dieu. D’ailleurs le Dieu jaloux, tout puissant et vengeur est mort avec Jésus-Christ comme l’a dit le dominicain Carbonel. (« Dieu est mort en Jésus-Christ »)

    V Le pari

    Demain dépend de nous.

    Nous sommes responsables de ce qui va arriver. Or nous courons dans la pire des directions. Nous poussons la compétition, la destruction des uns par les autres. Si je suis en compétition avec l’autre, je ne tisse plus de lien, par conséquent je suis en train de ma suicider. Il faut extirper la notion de compétition de toute la société.  « Il faut dire : tu vas te construire avec l’aide des autres, et pas tu vas être meilleur que les autres. »

    Autre défi : l’augmentation de la population. Son souci est toujours ce nombre de 11 milliards que nous allons atteindre. Pour s’y apprêter, nous devons consommer moins pour qu’il y ait de la place pour les futures générations. Il faut être égaux dans le partage des richesses de la terre. Pour aider à affronter la surpopulation, il faut absolument favoriser l’éducation des filles.

    L’avenir est donc une question de partage. Et Dieu dans tout cela ? « Si l’homme construit l’amour, il construit Dieu. Il n’y a pas besoin de chercher plus loin ».

     

    Peut-être ces quelques idées vous donneront-elles l’envie de
    revoir cette émission.

  • De Jésus

    J'ai lu pour vous le dernier livre de Christian de Duve.

    On se souvient de son décès au début de cette année, le 4 mai. Dans ce livre il résume succinctement sa vie sous tous ses aspects.

     

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    De Jésus à Jésus
    en passant par Darwin

     

    Christian de Duve parle d’abord de son enfance, de son collège à Anvers chez les jésuites. Ces années sont celles où il acquiert le goût de l’apprentissage.

    A cette époque il est séduit par la médecine. C’est le côté romantique de la profession qui l’attire, pour se pencher sur une humanité souffrante.

    De Jésus à Darwin

    Il s’inscrit à l’université comme étudiant chercheur. Le goût pour la recherche de la vérité scientifique lui fait abandonner les certitudes enseignées par les jésuites, pour ne s’attacher qu’aux vérités dont on peut donner la preuve.

     

    Il participe à la recherche sur l’insuline. Le voilà lancé vers la découverte de la cellule et il s’y consacrera dans le détail au point qu’il ne pratiquera pas la médecine ! Pour ces travaux sur la cellule il recevra le Prix Nobel en 1974.

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    Il sera ensuite appelé par la fondation Rockefeller à fonder un laboratoire aux EU en plus de celui de Louvain. Cela élargit fortement son expérience.

    En 1968, il fait la prise de conscience de la responsabilité du scientifique vis-à-vis de la société. Un autre événement est la séparation de Louvain et le déménagement  de Louvain-la-Neuve. Il procède à la réorganisation de l’équipe de recherche et il fonde l’Institute of cellular and molecular pathology (ICP, qui est devenu "de Duve Institut").

     Son travail sur l’évolution vers la cellule l’amènera à écrire : Construire une cellule en 1990 (il préfère le titre en anglais :  Blueprint for a cell  dans lequel il exprime les propriétés fondamentales communes à tous les êtres vivants.

    A cette époque il prend le temps de s’intéresser aux disciplines connexe à la sienne. Il s’intéresse à l’évolution en général et fait la connaissance de Lamarck et Darwin. Il décrit le périple accompli depuis  Poussière de vie  (1996) jusque   Génétique du péché originel  (2010).

     

    Son parcours est un mélange de hasard, dans les rencontres et les occasions qu’elles lui ont procuré. Il est aussi fait de la nécessité de poursuivre l’excellence nécessaire à la recherche scientifique.

     De Darwin à Jésus

     

    Dans ce chapitre, il parle, non plus de sa spécialité, mais sa culture globale recouvrant  toutes les sciences. Il résume l’origine de l’humanité et de ses gènes. Il déplore le « péché originel génétique » qui amène les groupes à s’opposer. Il déplore ainsi l’état actuel où nous a conduit l’évolution et à toutes les oppositions qu’elle génère.

    Il se souvient alors des jésuites anversois et pense trouver en Jésus un sage qui ferra dépasser les clivages où conduit l’évolution. Il dépouille alors Jésus de toute sa coloration biblique et de son utilisation dans l’Eglise pour ne garder qu’un précepte : « Aimez-vous les uns les autres ». Précepte qui doit faire dépasser le « struggle for live » du Darwinisme.

     

    Il pense trouver là une nouvelle forme de rédemption. Seulement il faudrait donner une nouvelle expression au message de Jésus qui soit plus universelle et adaptée aux conditions de vie d’aujourd’hui. Et cela ne peut venir de (des) Eglise, mais de la base.

    Esquisse d’une pensée

     Normalement il ne croit pas à une autorité, il adhère à l’univers, la vitesse de la lumière, l’ADN … Il pratique le doute méthodique et ne veut  rien admettre qui ne soit prouvé de manière irréfutable.

    Un phénomène l’intrigue : l’énigme du cerveau,  sa taille, le nombre impressionnant de neurones, le phénomène de la conscience

    Il ne fait pas de philosophie, sinon pour refuser tout dualisme : esprit – matière, Dieu – création. Il refuse le principe anthropique, la finalité. Il croit en une seule Réalité Ultime.

    Il trouve trois facettes à l’Ultime Réalité. Une facette intelligence qui conduit au vrai. Una facette sensibilité qui conduit au beau. Une troisième facette, éthique, qui préside à la recherche du bien.

    Envoi

    Le résumé de sa vie est ainsi fait de recherche scientifique, de la découverte de la cellule. A cela s’ajoute la découverte de l’évolution et des traits d’égoïsme qu’elle comporte. Pour finir par la mise en évidence du message d’amour qui permettra de dépasser les oppositions dans l’humanité.

     

     

    Voilà un livre que tout amoureux des sciences doit avoir lu !

  • Evolution et création

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    Dans le journal Dimanche Express n° 24 du 26 juin 2011, a paru un article intitulé :

    Le créationnisme progresse … le bon sens régresse.

    L’article parle des doctrines développées par les évangélistes et les musulmans qui présentent la création faite directement par Dieu. L’auteur, Louis Mathoux, conclut en faveur de l’Europe où les chrétiens voisineraient avec la théorie de l’évolution et il qualifie ce voisinage de « bon sens ».

    La réalité est peut-être tout autre.

    On peut se demander si ces réactions du monde religieux ne sont pas une réponse à l’extrémisme du milieu scientifique. Les scientifiques sont fiers d’être les adeptes d’une loi unique, la même pour tous. Cette fierté les amène parfois à devenir dogmatiques. Ils laissent croire que la connaissance scientifique de l’univers est la connaissance suprême, qu’elle va supplanter toutes les autres. Cela prend ainsi l’allure d’une religion. Il est donc compréhensible que des religions ou sectes s’opposent à cette attitude.

    Il se fait que les sectes qui refusent la mainmise de l’évolution sur l’énoncé de la destinée humaine sont très clairement à nos yeux des extrémismes. Mais nous ne prenons plus conscience que l’adhésion à la science est aussi un extrémisme.

    En Europe, les chrétiens ne s’opposent plus à la science mais est-ce bien une réconciliation ? Cela vient peut-être du fait que les chrétiens ont regagné les catacombes de l’intériorité et ont laissé la place publique occupée uniquement par cette idée que l’homme serait simplement le produit de l’évolution.

    La présentation scientifique de l’évolution, principalement celle des « homo » qui aboutit à l’ « homo sapiens» conduit automatiquement à penser que l’esprit de l’homme est une émanation de l’évolution et donc des lois de l’univers. C’est la seule position que l’on peut exposer publiquement à tous en Europe.

    Ce qui ne correspond pas à la foi chrétienne, ni à d’autres fois religieuses, ni même à la génétique. La liberté est individuelle et personnelle et ne peut être le simple produit d’une évolution biologique. C’est aussi la conviction du généticien qui a dit «  Il n’y a pas de gène de la liberté » !

    Et la pensée de Theillard de Chardin ne va pas nous aider. Celui-ci a eu des intuitions géniales, certes, mais le vocabulaire employé pour exprimer la montée en conscience n’arrive pas à nuancer la description de l’évolution et à distinguer l’homme de tout autre être matériel ayant déjà un « grain de conscience ». Si, pour le chrétien, cette pensée ne gêne pas sa foi en la valeur de la personne, elle laisse toujours la possibilité de penser que l’esprit de l’homme est le produit de l’évolution.

    En définitive, l’existence du créationnisme, tant évangéliste que musulman, ne constitue pas une régression mais est un élément d’équilibrage face à la position scientiste de l’évolution. La vision scientifique de l’univers n’est pas la seule et il faut ménager une place convenable à une vision où l’homme n’est pas un démiurge maître de l’univers, mais où il est l’hôte d’une réalité qui le précède et le dépasse.

    Il est donc heureux que les penseurs européens aient une opposition qui les fera réfléchir, peut-être, sur la place exclusive qu’ils ont donnée à la science pour comprendre la vie humaine et qu’ils remettent à l’honneur les trois modes de connaissances de l’homme. La science, qui détaille comment fonctionne l’univers, ensuite la philosophie qui échafaude des visions du monde qui permet à l’homme d’orienter sa vie personnelle et sa vie en commun via associations, nations, cultures... et enfin la contemplation qui s’attache à être présent à cette réalité mystérieuse qui nous englobe et de qui nous tenons chacun notre liberté.